Question 61 LA DISTINCTION ENTRE JUSTICE COMMUTATIVE ET JUSTICE DISTRIBUTIVE Les parties de la justice. Elles se divisent en trois groupes. I. Les parties subjectives, qui sont les espèces de la justice : distributive et commutative (Q. 61-78). - II. Les parties intégrantes (Q. 79). - III. Les parties potentielles, c’est-à-dire les vertus annexes (Q. 80-120). Les parties subjectives appellent une double étude : 1) Les parties proprement dites de la justice (Q. 61-62). - 2) Les vices opposés (Q. 63-78). Et parce que la restitution apparaît comme un acte de la justice commutative, il faut d’abord étudier la distinction entre justice commutative et justice distributive (Q. 61), ensuite la restitution (Q. 62). 1. Y a-t-il deux espèces de justice : commutative et distributive ? - 2. Leur juste milieu se détermine-t-il de la même façon ? - 3. Ont-elles la même matière, ou une matière multiple ? - 4. Dans quelques-unes de ses espèces, la justice s’identifie-t-elle à la réciprocité ? Article 1 Y a-t-il deux espèces de justice : distributive et commutative ? Objections : 1. Il semble que cette distinction soit malheureuse, car il ne peut exister une sorte de justice qui nuise à la multitude, puisque la justice est ordonnée au bien commun. Mais distribuer les biens communs à beaucoup nuit au bien commun de la multitude parce que cela épuise les ressources communes, et aussi parce que cela corrompt les mœurs, car Cicéron déclare : “ Celui qui reçoit un don devient pire et de plus en plus prêt à en attendre autant. ” Donc, la distribution ne relève d’aucune espèce de justice. 2. L’acte de la justice consiste comme on l’a vu, à rendre à chacun son dû. Or, dans une distribution, on ne rend pas à chacun ce qui était son dû, mais chacun s’approprie un bien nouveau qui était un bien commun. Donc, cela ne relève pas de la justice. 3. La justice n’est pas seulement chez le prince ; comme on l’a dit, elle est aussi chez les sujets. Mais distribuer concerne toujours le prince, donc la justice n’a pas à s’en occuper. 4. “ Une juste distribution, dit Aristote, est une distribution de biens communs. ” Or les biens communs sont du ressort de la justice légale. Donc la justice distributive n’est pas une espèce de la justice particulière, mais de la justice légale. 5. L’unité et la multiplicité ne peuvent être le fondement d’une distinction spécifique dans la vertu. Or la justice commutative consiste à rendre quelque chose à quelqu’un, et la justice distributive, à donner quelque chose à plusieurs. Ce ne sont donc pas des espèces différentes de la justice. En sens contraire, Aristote distingue deux sortes de justice et dit que “ l’une nous dirige dans les distributions et l’autre dans les échanges ”. Réponse : Ainsi que nous l’avons dit, la justice particulière s’ordonne à une personne privée, qui est avec la société dans un rapport comparable à celui de la partie avec le tout. Or une partie comporte une double relation : d’abord celle de partie à partie, à laquelle correspond dans la société la relation d’individu à individu. C’est cet ordre de relations que dirige la justice commutative, qui a pour objet les échanges mutuels entre deux personnes. Entre le tout et les parties on envisage un autre ordre, auquel ressemble l’ordre de ce qui est commun aux individus. Cet ordre est celui que dirige la justice distributive, appelée à répartir proportionnellement le bien commun de la société. Il y a donc bien deux espèces de justice, l’une distributive, l’autre commutatives. Solutions : 1. Dans les libéralités des personnes privées, la modération est recommandée, tandis que la dissipation est coupable ; de même, dans la distribution des biens communs, il faut observer une certaine modération, que détermine la justice distributive. 2. La partie et le tout sont, d’un certain point de vue, identiques, en ce que tout ce qui appartient au tout appartient d’une certaine façon à la partie ; et c’est ainsi que lorsqu’on partage entre les membres de la communauté un bien commun, chacun reçoit en quelque sorte ce qui est à lui. 3. Procéder à la répartition des biens communs appartient à celui-là seul qui a la charge de ces biens. Les sujets à qui ils sont distribués n’en ont pas moins à pratiquer la justice distributive, en se montrant satisfaits si la répartition est juste. Il arrive parfois que les biens communs à distribuer appartiennent non pas à la cité, mais à une famille ; en ce cas, c’est l’autorité d’une personne privée qui fixe la répartition. 4. Tout mouvement est spécifié par son terme final. C’est pourquoi il appartient à la justice légale d’ordonner au bien commun les biens particuliers ; mais inversement, ordonner le bien commun au bien des individus en le leur distribuant concerne la justice particulière. 5. La justice distributive et la justice commutative ne se distinguent pas seulement par leur objet un et multiple, mais par la nature même de la dette qui les concerne : devoir à quelqu’un un bien commun est autre Chose que lui devoir un bien qui lui est propre. Article 2 Le juste milieu se détermine-t-il de la même façon dans la justice commutative et dans la justice distributive ? Objections : 1. Il semble bien, car ces deux justices sont des parties de la justice particulière, nous venons de le dire. Or, dans toutes les parties de la tempérance ou de la force, le juste milieu est déterminé de la même façon. Donc, il doit l’être aussi dans les deux justices, distributive et commutative. 2. La forme de la vertu morale consiste en un juste milieu déterminé rationnellement. Donc, puisqu’une seule vertu n’a qu’une seule forme, il semble bien que dans ces deux espèces d’une seule vertu, le juste milieu doit être déterminé de la même façon. 3. Dans la justice distributive, le juste milieu s’établit en tenant compte de la dignité différente des personnes. Mais cette dignité intervient aussi dans la justice commutative, par exemple dans les peines, car celui qui frappe le prince est plus sévèrement puni que celui qui frappe une personne privée. Donc, le juste milieu s’établit de la même façon dans l’une et l’autre justices. En sens contraire, le Philosophe dit que dans la justice distributive le juste milieu s’établit selon une proportion géométrique, et dans la justice commutative selon une proportion arithmétique. Réponse : Comme nous venons de le dire, il appartient à la justice distributive de donner quelque chose à une personne privée pour autant que ce qui appartient au tout est dû à la partie. Mais ce dû est d’autant plus considérable que la partie occupe dans le tout une plus grande place. Et c’est pourquoi, en justice distributive, il est donné d’autant plus des biens communs à une personne que sa place dans la communauté est prépondérante. Dans les communautés à régime aristocratique, cette prépondérance est donnée à la vertu ; dans les oligarchies, à la richesse ; dans les démocraties, à la liberté ; et sous d’autres régimes, d’autres façons. C’est pourquoi, dans la justice distributive, le juste milieu vertueux ne se détermine pas par une égalité de chose à chose, mais selon une proportion des choses aux personnes ; de telle sorte que si une personne est supérieure à une autre, ce qui lui est donné doit dépasser ce qui est donné à l’autre. Et c’est pourquoi le Philosophe dit qu’un tel milieu vertueux s’établit selon une proportion géométrique, où l’égalité n’est pas une égalité de quantité, mais une égalité proportionnelle. Nous disons ainsi que 6 est à 4 comme 3 est à 2, parce que nous y trouvons la même proportion sesquialtère, c’est-à-dire telle que le plus grand nombre égale une fois et demie le plus petit. Cette égalité n’est pas, comme on le voit, une égalité de différences entre les quantités comparées, puisque la différence entre 6 et 4 est 2, et celle entre 3 et 2 est 1. Au contraire, dans les échanges, on rend à une personne particulière quelque chose en remplacement de ce que l’on a reçu d’elle ; ce qui est évident dans l’achat et la vente, qui nous donnent la définition élémentaire de l’échange. Il faut égaler objet à objet, de telle façon que, tout ce que l’un a reçu en plus en prenant sur ce qui est à l’autre, il le lui restitue en égale quantité. Et ainsi l’égalité s’établit selon une moyenne arithmétique que fixe un excédent quantitatif égal : ainsi, 5 est le milieu entre 6 et 4 ; il dépasse l’un des deux nombres d’une unité et est dépassé par l’autre d’autant. Si donc, avant tout échange, les deux parties avaient 5 et que l’une d’elles reçoit 1 de ce qui appartient à l’autre, elle aura 6 et il ne restera à l’autre que 4. Pour revenir au juste milieu, il faudra, en justice, que la partie qui a 6 donne 1 à celle qui a 4 ; en effet, l’une et l’autre auront ainsi 5 qui est le milieu. Solutions : 1. Dans les autres vertus, le milieu est déterminé selon la raison, et non pas selon la réalité objective. Mais, dans la vertu de justice, il est fixé objectivement le juste milieu varie avec les objets. 2. La forme générale de la justice est l’égalité, pour la justice distributive comme pour la justice commutative ; mais dans la première elle s’établit selon une proportionnalité géométrique ; dans 1 seconde, selon une proportionnalité arithmétique. 3. Dans les actions et les passions, la condition de la personne est un élément de la valeur quantitative de la chose considérée objectivement ; l’offense est plus grave si l’on frappe le prince que si l’on frappe une personne privée. Et ainsi la condition de la personne est considérée en soi, par la justice distributive ; et par la justice commutative, dans la mesure où elle est cause de distinctions réelles. Article 3 La justice distributive et la justice commutative ont-elles la même matière, ou une matière multiple ? Objections : 1. Il semble que la matière de ce deux justices ne soit pas différente. En effet, un diversité de matière fait une diversité de vertu c’est évident pour la tempérance et la force. Donc, si la matière de la justice distributive est différente de la matière de la justice commutative, il semble qu’elles ne pourront appartenir à la même vertu de justice. 2. La distribution qui concerne la justice distributive “ a pour objet l’argent ou l’honneur, ou tout autre bien pouvant être réparti entre les membres d’une communauté ”, dit Aristote. C’est donc bien un échange réciproque entre personnes, qui relève de la justice distributive. Donc ces deux justices ont une matière identique. 3. Supposons que la matière de la justice distributive soit autre que celle de la justice commutative ; cette différence de matière causera une différence spécifique ; donc, là où il n’y aura pas de différence spécifique, il n’y aura pas de différence de matière. Or le Philosophe pose une seule espèce de justice commutative, dont la matière est pourtant multiple. Il semble donc que ces deux espèces de justice ont la même matière. En sens contraire, Aristote l’affirme : “ Une espèce de justice règle les distributions ; une autre, les échanges. ” Réponse : Comme nous l’avons dit plus haut, la justice concerne les œuvres extérieures, c’est-à-dire la répartition et l’échange qui sont un usage de réalités extérieures : biens, personnes, ou même actions. Un usage de biens, quand par exemple on prend ou on rend à quelqu’un un objet lui appartenant ; de personnes, lorsqu’on commet une injustice contre la personne même d’un homme, en le frappant ou en l’injuriant, ou bien encore quand on lui rend des marques extérieures de respect ; d’actions enfin, si quelqu’un en exige d’autrui à juste titre, ou lui rend un service. Donc, si nous prenons comme matière de l’une ou l’autre justice tout ce dont l’usage est une activité externe, la justice distributive et la justice commutative ont la même matière ; car ces biens peuvent être, ou retirés d’un ensemble commun pour être distribués à des personnes privées, ou être échangés de l’une à l’autre ; il y a aussi une certaine distribution, et un certain échange compensatoire de travaux pénibles. Mais si nous prenons comme matière, dans chacune de ces deux justices, les actes principaux eux-mêmes par quoi nous faisons usage des personnes, des biens ou des actions, nous devons distinguer deux matières, car la justice distributive règle la répartition, et la justice commutative les échanges entre deux individus. De ces échanges, les uns sont involontaires, les autres volontaires. Ils sont involontaires quand quelqu’un se sert du bien, de la personne ou de l’action d’un autre contre son gré, ce qui peut s faire, soit secrètement par fraude, soit au grand jour par violence ; et cet abus peut avoir pour objet un bien, une personne libre, ou une personne lié à une autre. Un bien : Si quelqu’un prend le bien d’autrui en se cachant, il y a vol ; s’il le prend a grand jour, il y a rapine. Une personne libre, alors deux cas sont à distinguer : La personne est lésée dans son existence même, ou dans sa dignité. Dans son existence, elle peut être attaquée par quelqu’un qui en se cachant la tue, la frappe, ou lui donne du poison ; ou qui, au grand jour, la tue, l’emprisonne, la frappe, ou la mutile. Dans sa dignité, quelqu’un peut être lésé de façon occulte, par de faux témoignages, des médisances qui ternissent sa réputation, ou d’autres procédés du même genre ; ou bien au grand jour, par une accusation devant les tribunaux ou une attaque injurieuse. Si l’injustice atteint une personne liée à une autre : On peut être lésé dans son épouse, et la plupart du temps, secrètement, par l’adultère ; ou dans un serviteur quand quelqu’un le débauche pour qu’il quitte son maître ; et tout cela peut aussi se faire au grand jour. Il en va de même des autres personnes conjointes à l’égard desquelles des injustices peuvent aussi être commises de toutes manières, comme à l’égard de la personne dont elles dépendent. Cependant l’adultère et le débauchage du serviteur sont proprement des injustices vis-à-vis de ces personnes. Remarquons que le serviteur étant une sorte de propriété, cette faute contre la justice se rattache au vol. Les échanges sont appelés volontaires quand quelqu’un transfère volontairement sa propriété à autrui. Si le bien est transféré à titre gratuit, comme dans la donation, ce n’est pas un acte de justice, mais de libéralité. Le transfert volontaire d’une propriété concerne la justice dans la mesure où il soulève une question de dette. Ce qui peut arriver de trois manières : 1° Quelqu’un transmet simplement sa propriété à un autre en compensation de la propriété d’autrui : c’est le cas de l’achat et de la vente - 2° Quelqu’un cède sa propriété à autrui en lui concédant l’usage de ce bien, à charge pour le cessionnaire de le rendre. Si cet usage est concédé gratuitement, il s’appelle usufruit pour tout ce qui peut produire un fruit ; prêt ou avance pour tout ce qui est incapable d’en donner, comme l’argent, les instruments, etc. Si l’usage n’est pas gratuit, on a une location ou un bail. - 3° Quelqu’un confie une propriété avec l’intention de la reprendre, et non pas à fin d’usage mais à fin de conservation, comme lorsqu’on met son bien en gage, ou lorsqu’on se porte caution pour un autre. Dans tous les actes de cette sorte, volontaires ou involontaires, le juste milieu se détermine de la même manière : l’égalité de la compensation ; et c’est pourquoi toutes ces actions relèvent d’une seule espèce de justice : la justice commutatives. Et cette Réponse résout les Objections. Article 4 Dans quelques-unes de ses espèces, la justice s’identifie-t-elle à la réciprocité ? Objections : 1. Il semble bien, car le jugement divin est la justice même ; or, c’est une formule du jugement divin, que l’on doit souffrir ce qu’on a fait endurer. Nous lisons en S. Matthieu (7, 2) : “ On vous jugera du jugement dont vous aurez jugé, on vous mesurera avec la mesure dont vous aurez mesuré. ” Donc la justice consiste simplement dans la réciprocité. 2. Dans l’une et l’autre espèces de justice, la rétribution suit une certaine règle d’égalité ; eu égard à la dignité de la personne, dans la justice distributive, et cette dignité doit être déterminée surtout par les services rendus à la communauté ; dans la justice commutative cette égalité est calculée d’après ce que l’on a subi. Dans l’un et l’autre cas, par conséquent, on supporte, par voie de réciprocité, tout ce que l’on a fait. 3. Surtout, il semble qu’il ne faudrait pas qu’un coupable ait à supporter le mal qu’il a fait sans qu’il soit tenu compte d’aucune différence entre le volontaire et l’involontaire : en effet, celui qui commet une injustice involontairement est moins puni. Or le volontaire et l’involontaire, qui viennent de nous, ne changent pas le juste milieu de la justice, qui est fixé objectivement et non subjectivement. Donc la justice semble être absolument identique à la réciprocité. En sens contraire, le Philosophe prouve que la justice ne s’identifie pas toujours à la réciprocité. Réponse : La réciprocité implique la compensation exacte de ce qu’on a subi, par rapport à l’action antérieure. Elle s’applique très proprement à ces cas d’injustice où quelqu’un lèse la personne de son prochain ; il le frappe : qu’il soit frappé. La législation mosaïque proclame la justice de ce principe : on lit en effet dans l’Exode (21, 23) : “ Vie pour vie, œil pour œil, etc. ” Et parce que prendre le bien d’autrui, c’est encore accomplir une action, on peut là encore parler de réciprocité : celui qui a causé un dommage à autrui doit subir un dommage dans ses propres biens. Et la justice de cette peine se trouve aussi dans la loi de Moïse (Ex 22, 1) : “ Si un homme a volé un bœuf ou une brebis, et qu’il l’ait tué ou vendu, il rendra cinq bœufs pour un bœuf, et quatre brebis pour une brebis. ” Enfin, ce terme de réciprocité peut s’appliquer encore dans les cas d’échange volontaire, où il y a action et passion des deux côtés ; mais alors le caractère volontaire diminue le caractère de passion, comme nous l’avons dit. En tout cela, le principe de la justice commutative exige une égalité de compensation : il faut que la passion subie soit compensée exactement par l’action. Mais cette égalité ne serait pas toujours réalisée si un coupable avait à subir une souffrance spécifiquement semblable à celle qu’il a causée. Ainsi, quelqu’un qui blesse injustement une personne plus élevée que lui, commet une action plus grave que ne serait la punition par laquelle il souffrirait la même douleur. C’est pourquoi celui qui frappe le prince n’est pas seulement frappé : il est châtié beaucoup plus sévèrement. Pareillement, lorsqu’on inflige à quelqu’un un tort involontaire dans ses biens, l’action est plus grave que la passion de même espèce que le coupable aurait à subir lui-même ; car celui qui a fait du tort à autrui n’en subirait aucun dans son propre bien. C’est pourquoi il est puni en restituant davantage, parce qu’il n’a pas fait tort seulement à un individu, mais à l’autorité publique en détruisant la sécurité qu’elle est chargée d’assurer. De même encore, dans les échanges volontaires, la parfaite égalité ne serait pas réalisée toujours si quelqu’un transmettait son bien en retour du bien d’autrui parce que ce bien peut être plus considérable que le sien. Et c’est pourquoi il faut, dans tous les échanges, que ce que l’on reçoit soit égal, suivant une mesure proportionnelle, à ce que l’on a donné. La monnaie a été inventée à cette fin. Ainsi, la réciprocité est un principe exact de justice commutative. Dans la justice distributive, au contraire, la loi de réciprocité n’a pas sa raison d’être ; il n’y est pas question, en effet, d’une égalité proportionnelle entre un bien et un autre, ou entre une passion et une action, mais entre les biens et la personne, nous l’avons dit. Solutions : 1. Cette formule de jugement divin est à entendre dans un sens de justice commutative, en tant qu’elle égale les récompenses aux mérites, et les supplices aux péchés. 2. Si l’on accordait à celui qui a rendu service à la communauté une rétribution pour le service rendu, celle-ci relèverait de la justice commutative, et non de la justice distributive. La question qui se pose en justice distributive n’est pas celle de l’égalité à réaliser entre ce que quelqu’un reçoit pour ce qu’il a dépensé, mais pour ce que l’autre a reçu selon la situation des deux personnes. 3. Quand l’injustice est volontaire, elle est plus grave, et ainsi elle peut être considérée comme d’un montant plus élevé ; il faut donc qu’un châtiment plus sévère vienne la compenser ; mais la différence est prise dans les biens en question, et non par rapport à nous, objectivement et non subjectivement. |